Avec la crise économique, les idées de Keynes reviennent à la mode. Deux de ses disciples, George A Arkelof et Robert J. Shiller, livrent un essai stimulant sur les forces psychologiques guidant la finance et l’économie.
Les « esprits animaux », donnant le titre à leur ouvrage, proviennent de l’opus majeur de Keynes, Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie (1936). L’économiste y observe que si une partie de l’économie semble mue par la main invisible ordonnant les intérêts d’agents parfaitement rationnels, comme le voulaient les héritiers d’Adam Smith, une autre part semble nettement moins rationnelle. L’homme n’est pas un pur automate calculateur : la finance a beau être le lieu de modèles mathématiques très sophistiqués, elle est aussi le domaine où l’exubérance irrationnelle nourrit régulièrement des bulles s’achevant en crises.
Arkelov et Shiller en appellent à une vision plus réaliste, et donc plus complexe, des agents économiques. Ils montrent par exemple que les notions de confiance, de sens de l’équité ou le besoin de se « raconter une histoire » (personnelle ou collective) ont une influence parfaitement observable sur le taux d’épargne, le taux de chômage, l’illusion monétaire (i.e la non prise en compte du rapport inflation-salaire-prix) ou l’émergence des folies collectives et spéculatives.
Ce qui est vrai en macro-économie l’est plus encore en micro-économie, et notamment dans la vie de l’entreprise. Un collaborateur est certes motivé par sa rémunération, car il utilise sa rationalité pour évaluer son meilleur intérêt : l’employeur qui entend jouer la carte du dumping salarial aura du mal à mobiliser les meilleurs talents du marché. Mais il est tout aussi sensible à des critères en apparence non-économiques, comme l’éthique, les valeurs, l’histoire, la culture et même l’imaginaire de l’entreprise. Laisser tous ces chantiers en friche, c’est ignorer la puissance des « esprits animaux » dans le comportement et la cognition des humains.
Référence : Akerlof GA, RJ Shiller (2009), Les esprits animaux. Comment les forces psychologiques mènent la finance et l’économie, Pearson.
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