mardi 17 mai 2011

Etes-vous préparé au capitalisme cognitif ? La valeur du capital… humain

D’où vient la richesse des nations ? Depuis Adam Smith, cette question a fait couler beaucoup d’encre. Certains considèrent que les institutions (État de droit et marché économique) sont la cause du succès, d’autres renvoient à des considérations historiques, géographiques, climatiques, environnementales, technologiques voire religieuses.

Heiner Rindermann (Université Chemnitz, Allemagne) et James Thompson (University College de Londres, Royaume-Uni) se sont penchés sur un autre facteur : la capacité cognitive. Ils ont ainsi comparé depuis 50 ans les PIB et les indices de cette valeur cognitive disponibles pour 90 États (tests de QI, nombre de brevets et licences par habitants, nombre de prix Nobel). Le résultat fait apparaître que l’intelligence moyenne est liée à la croissance économique : selon le calcul des auteurs, à chaque point de QI gagné correspondrait 229 $ constants de PIB. La différence est encore plus marquée pour les percentiles supérieurs (c’est-à-dire le niveau des 5% les plus éduqués de la population), où un point de QI correspond à 468 $. « Au sein d’une société, observent les chercheurs, la part des personnes les plus intelligentes est importante pour la productivité. Ils sont en pointe pour le progrès technologique, l’innovation, la direction du pays ou celle des organisations, comme entrepreneurs, etc. ».

Bien sûr, la causalité est complexe et en partie circulaire : la qualité cognitive moyenne d’une population dépend en partie de la qualité de son système éducatif, qui provient elle-même de la richesse, c’est-à-dire la part de la valeur créée qui est dédiée à l’instruction des enfants et la formation des adultes.

Mais le résultat de Rindermann et Thompson confirme ce que d’autres ont diagnostiqué : le capitalisme productif fondé sur la force de travail et de transformation physique du monde cède la place à un capitalisme cognitif où les tâches sont de plus en plus abstraites, symboliques, immatérielles, et requièrent davantage la mobilisation des neurones que des muscles. L’intelligence purement logique est loin d’être la seule concernée, car l’intelligence verbale ou l’intelligence contextuelle sont aussi des conditions d’adaptation à l’évolution des marchés et des entreprises. On en revient à l’homme : « Je pense que dans l’économie moderne, le capital humain et l’aptitude cognitive sont plus importants que la seule liberté économique », observe Rindermann. Plus que jamais, les entreprises ont besoin de sélectionner des collaborateurs de talent, mais aussi de les former aux défis intellectuels d’un environnement cognitif en mutation rapide ; plus que jamais, les Etats ont besoin de former la population et de considérer l’éducation comme une condition à la survie de leur indépendance économique et culturelle.

Référence : Rindermann H, J Thompson (2011), The effect of cognitive ability on wealth, as mediated through scientific achievement and economic freedom, Psychological Science, epub, doi: 10.1177/0956797611407207
Share |

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire