mardi 22 mars 2011

Maîtriser ses humeurs. Anxiété et négociation font mauvais ménage…

Dans presque toutes les situations de la vie sociale et économique, particulièrement dans la vie des organisations, nous devons relever le défi de la négociation avec les autres en vue de parvenir à nos objectifs. Si l’art et la logique de la négociation ont donné lieu à une littérature substantielle, peu de chercheurs se sont intéressés jusqu’à présent à son arrière-plan émotionnel. On sait que les humeurs positives tendent à renforcer l’esprit coopératif (et la réussite des négociations) quand les humeurs négatives ont l’effet inverse.
De façon assez surprenante, ce sont la colère et le plaisir dont les rôles dans la négociation ont été analysés dans le passé, mais pas l’état émotionnel le plus immédiatement associé à une tractation difficile : l’anxiété.

Alison Wood Brooksa et Maurice E. Schweitzerb (Université de Pennsylvanie) ont comblé ce vide par une publication relatant quatre expériences différentes. Plusieurs centaines de volontaires ont été placées dans des situations de négociation, avec diverses analyses quantitatives à la clé, et un contrôle de leur niveau d’anxiété (induit par diverses perturbations juste avant les expériences, avec un groupe-contrôle neutre pour chaque expérience). Quels en sont les enseignements ?
  • L’anxiété pousse à bâcler les pourparlers : le sujet anxieux vise moins haut que ses attentes, fait une première offre plus basse, accepte plus vite un accord même s’il est inférieur à ses objectifs initiaux ;
  • En particulier, la première offre (dont il a été montré qu’elle est déterminante dans l’issue de toute négociation) est significativement plus basse chez les sujets anxieux ;
  • Il en va de même pour la durée totale de l’échange, plus courte chez les sujets anxieux : ils se comportent comme s’ils veulent « fuir » la situation qui les stresse, ce qui induit plus de concessions ;
  • Ce niveau initial d’anxiété peut cependant être partiellement ou totalement compensé par le niveau de maîtrise de soi des participants (mesuré par le Negotiation Aptitude Test), de sorte que la disposition anxieuse n’est pas une fatalité.
Après avoir longtemps fondé leur raisonnement sur le principe d’un agent rationnel maximisant son intérêt, les sciences économiques en viennent à s'intéresser à un homme plus "réel" dont la rationalité se trouve largement limitée par le manque d'information mais aussi “bruitée” par toutes sortes de sensations et d'émotions. L'importance de ces dernières ne saurait être négligée dans la vie de l'entreprise comme dans la conduite des affaires.

Référence : Wood Brooksa A, Schweitzerb ME (2011), Can Nervous Nelly negotiate? How anxiety causes negotiators to make low first offers, exit early, and earn less profit, Organizational Behavior and Human Decision Processes, epub, doi:10.1016/j.obhdp.2011.01.008
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