mercredi 17 novembre 2010

Words, words, words… Peut-on détecter les mensonges d’un dirigeant ?

« Un flux très soutenu de clients », « un environnement d’échange très robuste »… ainsi s’exprimait à propos de son activité Erin Callan, le CEO de Lehmann Brothers, en mars 2008. On connaît la suite.

David Larcker, chercheur à l’Université Stanford, et Anastasia Zakolyukina, l’une de ses étudiantes en MBA, se sont livrés à une substantielle analyse du discours des dirigeants d’entreprise. Ils ont délaissé les rapports financiers trimestriels, dont le langage est très formaté et le contenu souvent lissé par les départements juridiques, pour leur préférer des entretiens téléphoniques directs – près de 30 000 au total – menés sur le long terme (plusieurs trimestres par dirigeant).

Larcker et Zakolyukina sont partis du principe suivant : si l’entreprise publiait une correction à la baisse sur les prévisions du rapport trimestriel précédent (10 % des cas), le dirigeant était probablement au courant du redressement à venir lors de l’entretien téléphonique. Par quoi leurs propos se caractérisent-ils dans ces conditions ?

Plusieurs éléments de langage semblent singulariser le dirigeant qui souhaite tromper la confiance de son interlocuteur sur la robustesse de ses résultats. Par exemple, il emploie plus fréquemment des formules dilatoires destinées à renforcer la crédibilité sans donner d’information réelle (« comme vous le savez sans doute »), moins fréquemment la première personne et l’auto-référence (sans doute inconsciemment pour ne pas s’approprier une proposition douteuse). Autre signe incitant à la suspicion : la présence de superlatifs positif(« formidable », « exceptionnel »).

Comme le rappelle David Larcker, ces données ne sont que des préliminaires : « Nous avons des résultats, mais il reste beaucoup de travail à accomplir. L’idée d’analyser le langage pour comprendre le comportement est un domaine de recherche très actif et demande des compétences variées ».

 
Référence : Larcker, David F. and Zakolyukina, Anastasia A., Detecting deceptive discussions in conference calls (2010), Working Paper, 83, Rock Center for Corporate Governance, Stanford University.
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